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Rencontre du 24/09/04
Michel Petite
Directeur Général Services juridiques-Commission européenne

Michel Petite

Michel Petite a ouvert sa présentation en rappelant que le Service Juridique constitue traditionnellement l’un des pôles principaux d’influence française à la Commission européenne, avec le Secrétariat général.

La France est en effet soucieuse de garantir sa présence à au moins l’un de ces deux postes. À ce titre, Michel Petite, ancien Chef de cabinet du Président Prodi, a décliné l’offre qui parallèlement lui avait été faite de prendre la tête de la Direction de la Concurrence, dans la mesure où les positions de cette dernière peuvent être contrebalancées par le Service juridique. Le S.J., par ailleurs, rend compte directement à la Présidence de la Commission ; les commissaires, pour toute procédure écrite, doivent également obtenir le feu vert du S.J. Autant d’éléments qui expliquent sa position stratégique dans l’architecture institutionnelle de la Commission.

Attributions du service juridique

Michel Petite a ensuite rappelé les principales attributions du Service juridique de la Commission : Tout d’abord une mission de conseil juridique, auprès de la Commission et de ses services. Dans la mesure où la Commission a la liberté de ne pas suivre les avis émis de manière indépendante par le S.J., ces avis ne sont pas rendus publics. Le Service juridique est par ailleurs l’avocat de la Commission devant les Cours de Luxembourg ainsi qu’à l’OMC, où il dispose d’une équipe permanente. Le S.J. dispose d’une équipe d’environ 300 personnes, parmi lesquelles une équipe de juristes linguistes dont la tâche, entre autres, est de cadrer tous les textes qui remontent jusqu’à la Commission.

Devant les Cours de Luxembourg (Cour de Justice et Tribunal de première instance), le S.J. est alternativement demandeur (Commission v. État membre) et défendeur (X v. Commission). En ce qui concerne les infractions des États membres au droit communautaire, Michel Petite fait remarquer que les procédures de précontentieux permettent de faire « fondre » de moitié le nombre des dossiers, les États membres préférant dans quasiment une moitié des cas se mettre en règle avant que la procédure n’aille plus loin que la mise en demeure. Cette pratique permet de compenser en partie la tendance à la hausse du nombre de contentieux, qui fait craindre à terme un engorgement de la Cour - que la nomination de 10 nouveaux juges à la suite du dernier élargissement de l’Union ne vient guère compenser.

Parmi les domaines concernés par les infractions présumées des États membres au droit communautaire, on remarque l’importance des infractions en matière d’environnement. La Commission, dans ce domaine, gagne presque toujours ses affaires, ce qui s’explique, selon Michel Petite, par le fait que les États n’arrivent pas à mettre en œuvre les directives trop complexes et trop diversifiées dans cette matière.

Le Service juridique, un juge constitutionnel

Michel Petite rappelle également le rôle de juge constitutionnel joué par le S.J., qui est chargé de répondre aux demandes d’interprétation émises par les cours nationales : ces renvois préjudiciels peuvent en effet donner lieu à des arrêts importants, dans la mesure où ils donnent les grandes lignes d’interprétation du Traité. Parmi les principaux pourvoyeurs de renvois préjudiciels, on notera en premier lieu l’Allemagne, mais également l’Autriche – les États fédéraux ayant en effet une pratique relativement « naturelle » du renvoi préjudiciel. Dans le cas italien, ce sont le plus souvent des juges de cours mineures qui pratiquent ce recours. Quant à la Suède, qui n’a pratiquement jamais procédé à un renvoi préjudiciel, le S.J. a lancé une procédure d’enquête pour mesurer la légalité de cette absence de renvoi.

Les renvois préjudiciels qui parviennent au Service juridique de la Commission donnent un reflet des préoccupations de l’Union : à ce titre, dans les domaines concernés par ces renvois, Michel Petite souligne la montée en puissance des questions de propriété intellectuelle. La question des aides d’États se fait également de plus en plus présente, ce qui correspond à une amélioration récente des pratiques juridiques nationales dans ce domaine - il y a encore peu, les juges nationaux n’étaient en effet quasiment jamais saisis en matière d’aide d’État.

Dans le domaine fiscal, compte tenu de l’unanimité que cette matière implique au Conseil, Michel Petite fait remarquer que les juges nationaux se substituent de fait au législateur, dans la mesure où il s’agit de questions posées dans des domaines de fait non légiférés. Il en est de même des questions sociales.

Bilan de l’action du Service juridique

Michel Petite propose par la suite une analyse des résultats des affaires traitées par le S.J. devant les Cours de Luxembourg. Devant le Tribunal de Première instance, la Commission perd environ 19% des affaires directes. Le S.J., en effet, utilise dans cette configuration son rôle de défendeur pour tenter de repousser certaines limites de compétence de la Commission - notamment, ces derniers temps, sur les questions de concurrence et les questions liées au pacte de stabilité. Devant la Cour de Justice, les résultats du S.J. de la Commission sont nécessairement meilleurs, puisque la position de demandeur du S.J. permet une sélection préalable des dossiers portés devant la Cour.

Michel Petite procède ensuite à une analyse des résultats du S.J. par domaine traité. Dans le domaine de la concurrence et des aides d’État, la Commission perd un nombre relativement important d’affaires – les aides d’État relevant encore d’un domaine complexe, fondé sur un système juridique encore flou et des jurisprudences mouvantes. Par contraste, les affaires en matière d’environnement sont presque systématiquement gagnées par la Commission, pour les raisons déjà évoquées. Dans les affaires du personnel (qui représentent pour le S.J. un nombre d’affaires qui n’est dépassé que par les questions agricoles), le S.J. gagne autant qu’il perd. Enfin, dans le domaine de l’Union douanière, les affaires perdues par le S.J. dominent : cette anomalie s’explique selon Michel Petite par la mauvaise qualité des règlements pour le recouvrement des créances douanières, qui exposent particulièrement la Commission dans ce domaine.

Michel Petite conclut sa présentation par une analyse globale des résultats du S.J. devant l’OMC : si la Commission gagne généralement contre les États-Unis, elle a tendance, pour les raisons symétriquement inverses, à perdre contre les PVD.

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